Espas YOUN : honorer la diversité des approches
©Nitsé Mathelier
Depuis sept ans maintenant, les écoles de danse Mapou Ginen, Ekspresyon et la compagnie Oredans, et leur directrice artistique respective Cindy Belotte, Aïka Mathelier et Shérane Figaro, s’allient et créent le collectif Espas YOUN pour mettre de l’avant les danses traditionnelles haïtiennes lors de l’une semaine intensive YOUN. Cette année, Cuba et la Colombie seront à l’honneur avec les enseignants Daniel Diaz de Tondoa, accompagné de Raiz Viva et Julio Hong. Une édition pour « rappeler les connexions entre les différents rythmes afrodescendants ».
« C’est en discutant avec Raphaëlle François, une danseuse haïtienne venue enseigner à Montréal, qu’on a eu l’idée d’avoir un endroit où plusieurs écoles qui offrent le même style de danse, mais avec des approches différentes, se rassemblent. Au fil des conversations, ça a germé et pris forme. On voulait mettre de l’avant la transmission des danses traditionnelles haïtiennes, notre héritage culturel », se souvient Aïka Mathelier. C’est alors en 2019 qu’a lieu la première édition de YOUN qui proposait alors trois semaines intensives de danse. « On s’est assagi avec le temps. Rapidement, on est passé à 4 jours et chacune d’entre nous donne un cours. Ça permet de montrer notre saveur au public, notre approche personnelle. Il y a aussi un atelier où on enseigne ensemble. De plus, un enseignant invité fait aussi partie de la programmation. C’est notre formule depuis plusieurs années maintenant », poursuit-elle.
Pour choisir l’artiste invité, les trois directrices n’ont pas de caractéristiques précises. Elles laissent leurs partages et leurs échanges guider leur choix. « On se met au défi chaque année et nous-mêmes ne savons pas d’avance dans quelle direction YOUN va nous mener. On souhaite rester authentique et trouver des artistes qui touchent à notre essence », exprime Cindy Belotte. Des valeurs communes doivent être partagées ainsi qu’une « ouverture au dialogue ». « Ce qui est important, c’est leur manière de transmettre leurs connaissances en danse et la façon dont ils abordent leur cours. Pour la plupart, on a déjà assisté à leur cours et c’est pour ça qu’on souhaite les inviter, parce qu’on a pu constater que quelque chose pouvait se développer entre nous », ajoute Mme Mathelier.
Ainsi, cette année, ce n’est pas un, mais bien deux artistes qui viendront enseigner à YOUN : Daniel Diaz de Colombie et Julio Hong de Cuba. Un choix qui s’est consolidé là encore à travers des échanges entre le collectif Espas YOUN et les invités. « On cherche toujours un lien avec les danses traditionnelles haïtiennes et avec eux on trouvait la connexion avec les rythmes afrodescendants qui sont aussi présents dans ces cultures, explique Aïka Mathelier. Il y a aussi en commun le partage de la résistance, de la lutte et l’utilisation de la danse pour célébrer cette résilience ».
Ainsi, l’intensif va commencer par un cours avec Cindy Belotte, Aïka Mathelier et Shérane Figaro, se poursuivre avec le cours de M. Hong puis celui de M. Diaz pour terminer tous ensemble. « On croit beaucoup aux cercles d’énergie, de danse, à la circularité de notre démarche. C’est une essence importante dans nos pratiques et ça permet une réelle connexion », pense Mme Belotte.
©Nitsé Mathelier
Libératrices et transformatrices
YOUN est un stage ouvert à tous, professionnel comme amateur, curieux de la danse comme novices. Et chaque année, Cindy Belotte et Aïka Mathelier sont surprises du public qui se présente. « C’est extrêmement varié : des gens de nos troupes, des habitués de YOUN, mais aussi des gens qui ont vu passer l’information sur les réseaux sociaux ou encore des gens qui n’ont jamais dansé de leur vie, explique la directrice artistique de Mapou Ginen. Ce sont en général des gens qui se cherchent, qui sont en quête d’une réponse. Bien qu’on ait chacun notre façon d’aborder les danses traditionnelles haïtiennes, ils reçoivent un retour X ou Y, quelque chose se crée ».
« Il faut aller à la rencontre des danses traditionnelles haïtiennes, quelque leur forme. Pour chaque individu, il y a quelque chose à découvrir », affirme Mme Belotte. Pour les deux artistes, il est primordial que les danses traditionnelles haïtiennes soient ouvertes à tout le monde. Elles sont d’ailleurs présentes à Montréal depuis de nombreuses années. : Mapou Ginen y est implanté depuis plus de 50 ans, Oredans et Ekspresyon depuis plus de 10 ans chacune. Pour la directrice de Mapou Ginen, la pérennité passe par l’ouverture. « Toutes les communautés peuvent y trouver leur compte, définitivement, conclut-elle et Mme Mathelier d’ajouter : « De plus, cela permet de changer le narratif. Les danses traditionnelles haïtiennes ont longtemps été perçues comme négatives, sombres, maléfiques. Par notre travail et avec toutes nos compagnies confondues, on démontre que ce n’est pas la réalité et qu’il y a beaucoup d’humanité, de collectivité, d’amour dans les danses traditionnelles haïtiennes. Elles sont libératrices et transformatrices ».
Stage intensif YOUN
Au Centre Création Danse Nyata Nyata
Du 7 au 12 juillet 2025