Chptrs revient en force
©Mathieu Prezelin
Après six ans d’absence, Chptrs fait son grand retour. Initié en 2014 par Chad Concepcion et Éric Olivier au studio Party Time à Québec, ce megacrew qui évoluait seulement dans le circuit compétitif souhaite désormais aller plus loin avec notamment leur propre showcase Industrie et un film. De plus, ce n’est plus un, mais bien six groupes de danseur.euse.s qui seront entrainés par six chorégraphes dans six studios à travers le Québec. Les deux danseurs professionnels Chad Concepcion et Éric Olivier nous en parlent.
« La COVID a mis fin à Chptrs puis quand la vie a repris, on a dû reprendre en main nos carrières, on pensait à autre chose. Mais dans les dernières années, relancer Chptrs a pris plus de place dans nos envies », explique Chad, danseur qui travaille notamment avec Wynn Holmes et qui a dansé notamment pour la comédie musicale Hair il y a deux ans.
Lors de sa création en 2014, Chptrs souhaitait « connecter des gens qui ne dansaient pas ensemble ». « Quand on fait des compétitions, c’est très fragmenté, on reste en petits groupes. Nous, on voulait proposer une grande forme, avec des danseur.euse.s plus jeunes et des plus vieux, qui voulaient en faire plus. On faisait alors partie du circuit compétitif, mais en proposant quelque chose de différent », se souvient Éric qui a récemment dansé pour le spectacle Pub Royal et qui chorégraphie notamment pour la chanteuse Naomi.
Pour leur grand retour, Chad et Éric ont choisi de mettre sur place un projet « avec et pour la communauté. ». Les deux complices ont donc pris la décision de former non pas un seul groupe, mais six, et ce, à des endroits différents : Québec, Montréal Rive-Nord, Montréal Rive-Sud, Montréal Est, Montréal Ouest et Gatineau. « Ça fait plus de 15 ans qu’on se côtoie et qu’on travaille tous les deux dans le milieu de la danse. On le connait très bien, on a un grand réseau. La danse, c’est un petit monde qui a besoin de classes, de workshops, de compétitions, et aussi de création. Il y a des danseur.euse.s de studio qui veulent peut-être devenir professionnel.le.s mais qui ne sont pas encore certain.e.s ou d’autres qui ont arrêté le circuit de compétition, mais qui veulent continuer à danser. On voulait créer une troisième voie pour ces artistes », poursuit Chad.
Chptrs souhaite donc recruter un nombre important de danseur.euse.s avec des profils diversifiés. « On veut vraiment donner la place aux artistes de studio et du milieu compétitif, qui ne sont pas formés dans des écoles institutionnelles, classiques ou contemporaines. On cherche vraiment des gens avec un parcours moins établi, ou moins reconnu, mais qui ont un entrainement et un niveau technique d’une grande valeur, développe Éric. On veut des gens qui sont prêts à travailler fort, à un haut niveau sans le mindset de la compétition. Des gens qui ont envie de faire partie d’un beau projet et ça manque au milieu ce genre d’initiative ».
L’idée de ramener Chptrs était aussi de proposer autre chose au milieu de la compétition. « Les choses changent, mais pas tant que ça. Le réseau compétitif peut parfois stagner un peu avec des numéros d’un très haut niveau qui pourrait regagner même cinq ans après, continue Éric. Venir raconter une histoire, sur de la musique originale, avec de beaux costumes et une grande distribution de danseur.euse.s, ça n’existe pas. On espère semer une graine, que les gens aient envie de faire la même chose ».
Cette toute première création, qui traitera du fait de ne pas se sentir à sa place dans le monde, sera chorégraphiée par Ricky Saint-Jusna, Badkass, Team White, Christbob Phu et Kristian & Cassie Dalisay et Éric Olivier lui-même. « Ce sont des gens qui sont alignés avec notre vision artistique, qui sont capables de travailler avec des grands groupes et qui ont une sensibilité et les outils pour travailler la dramaturgie, l’espace, etc. On voulait aussi des chorégraphes prêt.e.s à pousser plus loin et à collaborer avec nous. Pour l’instant, on n’a aucune idée de ce à quoi va ressembler la pièce. On va se construire au fur et à mesure des répétitions et des rencontres », explique Éric.
©Bastien Primeau et Mickaël A. Bandassak
Aller plus loin
L’événement international Hit the Floor sera le premier à accueillir la pièce de Chptrs, non pas dans le volt compétition, mais comme un showcase. « Ça nous permet d’avoir une première scène reconnue, de montrer la danse qu’on souhaite faire tout en restant dans la communauté. Pour nous, c’était un incontournable. Les danseur.euse.s attendent avec impatience cet événement chaque année », explique Chad. Mais Chptrs vise plus loin qu’une seule scène. Éric et Chad prévoient déjà de remontrer cette création lors de leur propre showcase Industrie. Un film de danse autour du projet sera aussi tourné. « On trouvait que ça faisait du sens, ajoute-t-il. La danse, c’est éphémère alors si on peut immortaliser certaines parties, c’est déjà bien ».
« Notre rêve, c’est que Chptrs soit un système qui supporte les danseur.euse.s » exprime Chad. En effet, les deux cocréateurs souhaiteraient dans un plus long terme pouvoir offrir des bourses et des subventions aux danseur.euse.s et chorégraphes « qui se cherchent encore » ou à celles et ceux « qui ont une idée, mais ne savent pas où aller et n’obtiennent pas d’argent pour ça ».
Chptrs vise aussi à créer « une réelle communauté » autour de la danse. « Les compétitions, ça permet de se montrer, mais dans le milieu, on n’a pas beaucoup de conférences, de moment en B2B (business to business) avec notre réseau. On aimerait inviter aussi des réalisateurs, des producteurs, des gens de la nuit, à voir notre travail. On souhaite que des connexions se créent ».
De plus, Éric et Chad aimeraient aussi pouvoir, par la suite, vendre des licences de spectacles. « L’idée, c’est de devenir un Broadway du Québec. Les studios pourraient acheter notre création et la monter avec leurs élèves, pour souligner leurs 10 ans par exemple, développe Chad. On souhaiterait aussi beaucoup créer des master class pour les chorégraphes. Là aussi, l’idée, c’est que les studios soient plus autonomes plutôt que de ne pas atteindre le niveau compétitif, ou de devoir toujours faire venir des chorégraphes de l’extérieur ».
En à peine quelques semaines, et quelques « DM », Chad et Éric ont déjà reçu une centaine de réponses. Un engouement qui encourage encore davantage les deux artistes dans leur décision. « C’est vraiment un honneur pour nous de pouvoir contribuer, à notre façon, à la forme d’art qu’est la danse, et de redonner à un milieu qui nous a beaucoup donné », conclut Chad.
Chptrs
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