Ce qui m’habite : droit dans les yeux

©Vanessa Fortin

Mercredi soir avait lieu la première de Ce qui m’habite de l’artiste Marie-Reine Kabasha, à Tangente, dans le cadre du OFFTA. Une proposition toute en douceur et en authenticité qui repose sur un enracinement profond et un beau lâcher-prise.

Dès l’entrée, on ressent une certaine familiarité dans la salle. Grâce à cet espace intime qu’est la salle verte de Tangente, au fait de pouvoir s’asseoir par terre ou encore d’avoir accès directement à Marie-Reine qui se prépare tranquillement, dans la lumière, tout est fait pour que les gens se sentent ensemble et se mettent à l’aise. Tout naturellement, on la voit saluer les siens et discuter. Puis elle fait un léger signe pour indiquer que le spectacle commence.

L’artiste se met alors dans son corps, et surtout s’écoute. Elle soupire, grimace, se délie, se balance, et entre en connexion avec elle devant nous. Cette intimité, bien qu’interne et personnelle, nous est tendrement partagée par des regards francs. En effet, tout au long de la pièce, Marie-Reine ne cesse de croiser, voire confronter les regards. Toujours droit dans les yeux. Le choix scénique va d’ailleurs dans ce sens puisque la lumière est quasiment toujours claire afin que l’interprète puisse distinguer les visages.

Ainsi, petit à petit, Marie-Reine prend l’espace par des mouvements parfois subtils, parfois amples, selon ce qu’elle ressent sur le moment. Tout en improvisation. Dans la douceur, on peut observer des détails très subtils qui font toute la maîtrise de sa danse. Des doigts qui caressent une nuque. Des plantes de pied qui jouent avec le sol. Un relâchement poussé à l’extrême, mais divinement ancré sur Terre. Ainsi, tout au long de l’œuvre, la danseuse se laisse porter par ses sens et nous les transmet. Que ceux-ci se traduisent en gestes, en cris, en sons ou en rires. Pour ajouter au sensible de la pièce, le tout se déroule sans musique. Ainsi, public et interprète vivent ensemble à la fois les sensations, mais aussi les bruits environnants. Là encore, c’est l’inattendu qui prime et qui dicte le déroulement de la soirée.

L’art du cœur

La musique vient finalement s’ajouter dans une deuxième partie de la pièce. Et celle-ci jouera en boucle. Une première fois peut-être pour nous laisser écouter attentivement les paroles. Une deuxième fois pour observer l’artiste s’inspirer. Et enfin, une troisième fois, pour s’abandonner après une tension corporelle intense et touchante. Dans cette spirale musicale, l’interprète de talent nous transporte encore davantage dans son intérieur et ses ressentis, tout en humilité et surtout en beauté. En plus d’offrir à l’audience sa sensibilité, on observe aussi qu’elle se livre à elle-même. Sur scène se retrouvent une cabane et des photos personnelles qui l’immergent dans son vécu et lui font traverser ses différents états de corps.

Ainsi, avec Ce qui m’habite, Marie-Reine partage avec le public ses états d’âme et ses états de corps à travers des improvisations structurées, sensibles et sensitives. Une belle immersion dans le travail de l’artiste, mais aussi dans toute sa sensibilité, sa sincérité et son humanité.

Marie-Reine Kabasha
Ce qui m’habite
Les 28 et 29 mai 2025
Ă€ Tangente

https://offta.com/evenement2025/ce-qui-mhabite/

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